Agences de publicité - Harcèlement moral et non-paiement d’heures supplémentaires d’un reporting solution manager = résiliation judiciaire du contrat de travail (CA Versailles 23 mars 2022, non définitif)
-Dans un arrêt du 23 mars 2022 (n° RG F 19/11437), un Reporting Solution manager de Re:sources France obtient la résiliation judiciaire de son contrat de travail avec les effets d’un licenciement nul pour plusieurs manquements de l’employeur.
La Cour d’appel de Paris juge illicite une convention de forfait jours, en affirmant que l’accord collectif ne prévoyant pas d’entretien annuel, ne répondait pas aux exigences légales, de sorte, que la convention est nulle.
La Cour fait également droit aux demandes du manager au titre d’un harcèlement moral et d’un manquement à l’obligation de sécurité en considérant que la charge de travail subie par le salarié dans un contexte de collaboration internationale et de sarcasmes de son supérieur hiérarchique avaient dégradé son état de santé.
Enfin, son employeur n’avait diligenté une enquête commune au CHSCT que tardivement et n’avait pris aucune mesure pour prévenir la réitération des faits.
La société s’est pourvue en cassation contre l’arrêt de la Cour d’appel de Paris.
Faits et procédure.
M. B a été engagé par la société Re:sources France selon lettre d’engagement du 24 mars 2011 à compter du 30 mai 2011, en qualité de Consultant SAP Senior - Hors Catégorie avec une rémunération mensuelle brute de 5.833,34 euros et une rémunération variable pouvant représenter jusqu’à 5 000 euros par an, selon le régime du forfait jours.
La société Re:sources France regroupe les différentes fonctions transverses du groupe Publicis : Ressources Humaines, Finance et comptabilité, Achats, service Juridique, Informatique, Services Généraux et Immobilier.
Selon avenant du 27 février 2014, M. B est devenu Reporting Solution Manager - Hors catégorie.
Par mail en date du 10 janvier 2017, M. B. a informé son supérieur hiérarchique de ce qu’il était victime d’une situation de harcèlement moral de sa part.
Dans un deuxième courriel du 5 octobre 2017, il a estimé que le comportement de ce même supérieur hiérarchique constituait des agissements de harcèlement moral.
Le 31 octobre 2017, M. B a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement.
Les 9 et 27 novembre 2017, par courrier au Directeur des ressources humaines, il a sollicité le report de cet entretien et a dénoncé des pressions et agissements répétés et graduels de la part de sa hiérarchie.
Le 13 novembre suivant, l’employeur a reporté l’entretien préalable au 1er décembre 2017.
M. B ne s’est pas présenté à l’entretien préalable.
Par courrier du 21 décembre 2017, l’employeur a informé M. B de sa décision conjointe avec le CHSCT de procéder à une enquête sur les faits de harcèlement moral qu’il a dénoncés.
Aucune suite n’a été donnée à la procédure de licenciement.
Le 28 mars 2018, les résultats de l’enquête ont été présentés lors d’une réunion extraordinaire du CHSCT.
M. B a été placé en arrêt maladie à compter du 6 octobre 2017 et ce jusqu’au 30 mai 2018.
Lors de la visite médicale de reprise, le 31 mai 2018, M. B a été déclaré inapte en ces termes :
« Visite d’inaptitude en une seule visite : inapte à tous les postes. L’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi au sein de l’entreprise, mais également dans l’ensemble du groupe Publicis ».
Le 14 août 2018, M. B a saisi le Conseil de prud’hommes de Paris aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail.
Le 27 juillet 2018, M. B a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement pour inaptitude.
La société Re:sources France lui a notifié son licenciement pour inaptitude le 27 août 2018.
Par une deuxième requête déposée au Conseil de prud’hommes le 4 décembre 2018, s’agissant de demandes nouvelles, M. B a contesté son licenciement.
Les deux procédures ouvertes pour chacune des requêtes ont été jointes.
Par jugement du 14 octobre 2019, M. B a été débouté de ses demandes.
Il a interjeté appel le 15 novembre 2019.
Le 23 mars 2022, la Cour d’appel de Paris, par jugement contradictoire :
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts au titre des repos compensateurs et la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé ;
Le confirme de ces chefs ;
Statuant à nouveau ;
Juge que la convention de forfait jours est nulle ;
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur B aux torts de la société Re:sources France avec effet au 27 août 2018 ;
Dit que la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d’un licenciement nul ;
Condamne la société Re:sources France à payer à M. B les sommes de :
- 24.169,50 euros au titre des heures supplémentaires ;
- 2.416,95 euros au titre des congés payés y afférents ;
- 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la durée maximale quotidienne de travail ;
- 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la durée maximale hebdomadaire de travail ;
- 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect du droit au repos quotidien et hebdomadaire ;
- 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
- 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité ;
- 18.700,02 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;
- 1.870 euros au titre des congés payés y afférents ;
- 55.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul ;
Dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2018 et les créances indemnitaires produiront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt ;
Condamne la société Re:sources France à remettre à M. B un bulletin de paie rectificatif, une attestation destinée à Pôle emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt ;
Rejette la demande d’astreinte ;
Condamne la société Re:sources France à payer à M. B la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne la société Re:sources France aux dépens de première instance et d’appel.
Au total, Monsieur B obtient la somme de 122.156,47 euros bruts.
La société s’est pourvue en cassation.
Pour lire l’intégralité de la brève, cliquez sur le lien ci-dessous
Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
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