Licenciement économique – Licenciement sans cause d’un chef de chantier de Cobalt pour absence de reclassement + non-paiement d’heures sup’ (forfait privé d’effet) et licenciement sans cause (CPH Paris dep, 22 juill. 2024)

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Le chef de chantier obtient 40 000 euros au total.

Il obtient un rappel de salaires de 6 700 euros du fait de l’application des minima conventionnels pour les forfaits jours dans le bâtiment, il obtient également 11 000 euros pour non-paiement d’heures supplémentaires, la forfait jours ayant été jugé privé d’effet.

Enfin le licenciement économique est jugé sans cause du fait de l’absence de recherche de reclassement, le salarié obtenant 20 000 euros de dommages intérêts et 2000 euros au titre de l’article 700 du CPC.

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2.1) Sur l'exécution du contrat de travail

2..1.1) Sur le salaire conventionnel pour un salarié en forfait jours

Monsieur X sollicite un rappel de salaires pour la période du mois de janvier 2018 au mois d'octobre 2019 au motif que la société COBALT ne lui a pas appliqué le salaire minimum prévu par la convention collective pour le statut de cadre au forfait jours et au coefficient 120. Il précise que son employeur avait, à sa demande, régularisé la situation uniquement à partir du mois d'octobre 2019.

L'AGS réplique que les avenants conventionnels prévoyant les minimas ne sont pas étendus et que le salarié ne justifie pas que la société COBALT était adhérentes aux organisations patronales signataires.

Toutefois, dès lors que par courrier du 24 octobre 2019, l'employeur a régularisé la situation pour la période postérieure au mois d'octobre 2019 en invoquant une simple erreur matérielle de son expert-comptable, le Conseil juge que la société COBALT a volontairement appliqué les avenants qui lui sont donc opposables.

Il convient donc de faire droit à la demande de rappel de salaires et de fixer la créance de Monsieur X au passif de la société COBALT à la somme de 6.136.13 euros et de 613,36 euros au titre des congés payés afférents.

2.1.2) Sur le forfait annuel en jours

Il est de principe que toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires, une amplitude et une charge de travail raisonnable ainsi qu'une bonne répartition du travail dans le temps.

Les mécanismes de contrôle et de suivi régulier de l'amplitude et de la charge de travail mis en œuvre doivent permettre à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable.

En l'espèce, le contrat de travail de Monsieur X stipulait, au titre de la durée du travail, que le salarié était soumis à un forfait annuel en jours et que sa situation serait examinée lors d'un entretien annuel portant sur sa charge de travail et l'amplitude de ses journées d'activité, l'organisation du travail dans l'entreprise, l’articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ainsi que sa rémunération.

Or, il n'est justifié d'aucun entretien de ce type entre les parties au cours de la relation de travail.

Dès lors, la convention de forfait conclue par Monsieur X et la société COBALT doit être déclarée nulle et ce dernier est bien fondé à solliciter le paiement d'heures supplémentaires.

2.1.3) Sur les heures supplémentaires

Il résulte des dispositions des articles L3171-2, alinéa 1er, L. 3171-3, et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Monsieur X sollicite un rappel de salaire de 17.346,10 euros au titre d'heures supplémentaires réalisées entre le 5 février 2018 et le 17 mars 2020. II soutient qu'il a effectué 527 heures supplémentaires pendant cette période.

Il produit à cet égard :

- un tableau mentionnant pour chaque jour de la période précitée l'heure de prise de poste, l'heure de fin de poste, un temps de pause quotidien de 1 heure, le nombre heures de travail par semaine, soit la plupart du temps et au plus 41.5 heures, le nombre d’heures supplémentaires par rapport à la durée légale de 35 heures, ainsi que le montant du rappel de salaire dû à ce titre, des relevés de pointage pour 5 semaines en 2018 mentionnant le plus souvent 40 heures de travail par semaine, un relevé de pointage du mois de février 2019 illisible et donc inexploitable et des relevés de pointage du mois d'octobre 2019 dont il ressort qu'il travaillait 39 heures par semaine.

Ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées que le requérant prétend avoir accomplies.

En défense, aucune pièce n'est produite sur les heures de travail effectuées par le salarié pendant la période précitée.

Compte tenu de ces éléments et du fait que Monsieur X disposait d'une liberté importante dans l'organisation de son travail de sorte que l'amplitude de ses journées de travail ne peut être considérée comme correspondant systématiquement à un travail effectif, le Conseil a la conviction que le requérant a effectué des heures supplémentaires, mais dans une proportion moindre qu'il allègue et lui alloue dès lors la somme de 10.398.61 euros correspondant à 39 heures de travail hebdomadaire.

Il convient également d'allouer au requérant la somme de 1.039,86 euros au titre des congés payés afférents.

En revanche, le dépassement du contingent annuel de 220 heures supplémentaires n'ayant pas été atteint en 2019, Monsieur X sera débouté de sa demande au titre du repos compensateur fondée sur les articles L3121-30 D3121-24 du code du travail.

Le requérant sera également débouté de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé fondée sur les articles L.8221-5 et L8223-1 du code du travail dès lors qu'il n'établit pas que c'est intentionnellement que la société COBALT n'a pas déclaré les heures supplémentaires qu'il a effectuées, alors au surplus qu'il était soumis à un forfait annuel en jours.

Enfin, Monsieur X ne justifiant ni de l'exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur ni d'un préjudice à ce titre qui justifierait de lui allouer, en sus des sommes précitées, des dommages et intérêts, il sera débouté de sa demande à ce titre.

 

2.2) Sur la rupture du contrat de travail

2.2.1) Sur l'obligation de reclassement

En application de l'article L1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique ne peut intervenir que lorsque les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement du salarié dans l'entreprise, ou dans les entreprises situées sur le territoire national du groupe auquel l'entreprise appartient, n'est pas possible.

L'obligation de reclassement est un élément justificatif du licenciement économique : si l'employeur ne satisfait pas à son obligation, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et c'est à l'employeur qu'incombe la charge de prouver qu'il n'a pas pu reclasser le salarié.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la SAS COBALT appartient au groupe MPA GROUPE composé de deux filiales: les sociétés COBALT et INDIGO 21

Or, il n'est justifié ni de recherches de reclassement au sein du groupe MPA GROUPE ni de l'impossibilité de reclassement de Monsieur X au sein du groupe.

En conséquence, le licenciement doit être jugé sans cause réelle et sérieuse sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens invoqués par de requérant au titre de la rupture du contrat de travail.

En revanche, Monsieur X sera débouté de sa demande d'indemnité pour inobservation de l'ordre des licenciements dès lors qu'il ne peut prétendre, en sus de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à une indemnité à ce titre.

 

Pour lire l’intégralité de la brève, cliquez sur le lien ci-dessous

https://www.legavox.fr/blog/frederic-chhum-avocats/licenciement-chef-chantier-respect-minima-36002.htm

Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)

CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)

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