Intermittents du spectacle, journalistes : depuis le 1er juillet 2014, pouvez-vous être employés en CDD moins de 24 h par semaine ?
24 heures sinon rien !
Les intermittents du spectacle, les journalistes sont une population de salariés, ultra précarisée.
Cette précarisation s’est accentuée avec la création en 2008, du régime de l’auto entrepreneur puisque certains intermittents du spectacle ou journalistes se voient maintenant demandés par leur employeur, de devenir auto entrepreneur en remplacement de leur CDD déjà très précaire.
En France, plus de 4 millions de personnes sont engagées par contrats à durée déterminée ou indéterminée à temps partiel. Sur ces 4 millions d’emplois, la moitié des contrats ont une durée hebdomadaire inférieure à 24 heures.
Pour limiter la précarisation des salariés à temps partiel, la loi n°2013-504 relative à la sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013 a repris les mesures de l'Accord National Interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 en fixant une durée minimale de 24 heures par semaine ou d'une durée mensuelle équivalente (104 heures par mois).
Les dispositions de la loi du 14 juin 2013 relatives au temps partiel sont entrées en vigueur au 1er janvier 2014. Pour permettre aux partenaires sociaux de négocier au niveau des branches, la nouvelle durée minimale hebdomadaire de 24 heures, il a été décidé de reporter l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions sur le temps partiel, au 1er juillet 2014 (Loi n°2014-288 du 5 mars 2014).
1) Principe : en CDD ou en CDI, intermittents du spectacle ou journalistes doivent être employés au moins 24 heures par semaine (ou 104 heures mensuelles)
Souvent, les journalistes ou les intermittents du spectacle (techniciens ou artistes) sont employés dans le cadre de contrats à durée déterminée précaires, d’une journée, de deux jours, voire plus.
Ces contrats à durée déterminée sont-ils soumis à la durée minimale de travail de 24 heures hebdomadaire (104 heures mensuelles) ?
La réponse est oui puisque la loi ne comporte que 3 exceptions à la durée minimale de 24 heures (cf §2 ci-dessous).
Ceci va créer des contraintes très importantes pour les entreprises, notamment du secteur audiovisuel qui employaient jusqu’à présent les journalistes ou intermittents du spectacle, sous contrat à durée déterminée, pour un, deux, voire trois jours, par semaine, ces derniers étant souvent à la disposition permanente de l’entreprise.
Toutefois, ce minimum de 24 heures hebdomadaire peut être réduit, par accord de branche étendu. A notre connaissance, rien n’a encore été négocié dans l’audiovisuel ou le spectacle.
2) 3 exceptions à la durée minimale de 24 h par semaine
Il peut être dérogé à cette durée minimale de 24 heures notamment lorsque :
2.1) Exception 1 : le salarié le demande, en raison de contraintes personnelles ou parce qu'il cumule plusieurs activité lui permettant d'atteindre la durée minimale d'activité (soit 24 heures hebdomadaire, soit 104 heures mensuel) (article L. 3123-14-2 du code du travail). Cette demande doit être écrite et motivée. L'employeur devra informer le Comité d'entreprise chaque année de l'ensemble des dérogations individuelles qu'il fera (article L. 3123-14-2 du code du travail).
Il est probable que les employeurs d’intermittents ou de journalistes vont leur faire signer des courriers dans lesquels ces derniers demandent à travailler moins de 24 heures.
2.2) Exception 2 : une convention ou un accord de branche étendu le prévoit (article L. 3123-14-3 du code du travail) ; C’est le cas notamment dans les branches suivantes : la propreté, les agences générales d’assurance, les cabinets dentaires, l’édition, le sport.
2.3) Exception 3 : le salarié est un étudiant âgé de moins de 26 ans qui a besoin d’une durée de travail compatible avec ses études. La durée dérogatoire devra nécessairement être compatible avec la poursuite des études (article L. 3123-14-2 du code du travail).
Les deux premières dérogations sont admises uniquement si l'employeur regroupe les horaires de travail du salarié sur des journées ou des demi-journées régulières ou complètes.
Toutefois, cette durée minimale ne s'appliquera pas notamment aux salariés des particuliers employeurs (article L. 3111-1 et L. 7221-2).
Hors des 3 cas de dérogations prévues par la loi, il ne sera pas possible d'employer des salariés pour une durée inférieure à 24 heures par semaine.
3) Pas de sanction (pour l’instant) à la violation de la durée minimum de 24 heures !
Etonnamment, la loi ne prévoit pas de sanction à la violation de la durée minimale de 24 heures.
Le salarié pourra-t-il demander que sa durée du travail soit portée à 24h et réclamer un rappel de salaire entre son horaire réel et les 24 heures ?
Ou encore, le salarié pourra-t-il réclamer une requalification en contrat de travail à temps complet ?
Les juges devront donc suppléer au silence de la loi, sauf si celle-ci est complétée prochainement.
Il n’y a pas non plus de sanction pénale en cas de manquement de l’employeur à cette durée minimale.
4) Application de la loi dans le temps
Pour les contrats en cours au 1er juillet 2014, la durée minimale de 24 heures hebdomadaire ne s'imposera qu'au 1er janvier 2016.
De plus, jusqu'au 31 décembre 2015, l'employeur peut refuser de recourir à une durée minimale de 24 heures lorsqu'un accord de branche prévoit une telle dérogation ou dans l'hypothèse où l'employeur refuse pour des raisons économiques (article 12, VIII, loi 2013-504 du 14 juin 2013).
Ce n'est qu'à compter du 1er janvier 2016 que la durée minimale s'appliquera d'office à tous les contrats, anciens comme nouveaux.
5) Majoration des heures complémentaires
Lorsque les salariés à temps partiel travaillent, au-delà de la durée fixée dans le contrat de travail, ils bénéficieront d'une majoration de 25% pour toutes les heures complémentaires effectuées au-delà des 10% de la durée prévue contractuellement (article L. 3123-17 et L.3123-18 du code du travail) ; une convention ou un accord peut prévoir un taux différent au moins égal à 10%.
Pour les heures complémentaires en-dessous des 10%, aucune majoration de salaires, ne sera due.
Frédéric CHHUM Avocat à la Cour
4, rue Bayard 75008 Paris
Tél : 01.42.89.24.48 Ligne directe: 01.42.56.03.00
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